Traversées poétiques
Nous sommes les poissons des abysses
par Santana Garcia
Es que somos peces del abismo que no han evolucionado para ser fosforecentes
Esta noche
no es más noche
que aquella en que Vallejo
descubrió el abandono de Dios.
Tampoco es más noche
que aquella en que, muy joven,
el mismo Dios, o tal vez otro,
quebró mis piernas por vez primera
para aventarme al acantilado del mundo.
Y aun así,
hay algo en ella que logra cimbrarme las arterias:
El fantasma de un faro derrumbado que me llama
al naufragio bajo las sábanas azules.
Bajo las sombras de esta misma luna nueva
que clava mis pies al suelo
un poeta anónimo
bajo el signo de una bandera
olvidada en los viejos diccionarios escolares
escribe un portentoso poema que nunca llegaré a leer.
Bajo estas mismas sombras donde mi sangre vibra
un gato en llamas camina por las azoteas del vecindario
inundando de pupilas la noche
−se hincha, se hincha…−
y tras los garajes, los perros se alborotan
con el paso de los fantasmas que buscan mi puerta.
Intuyo
(acaso la verdad me ha sido murmurada
por una voz secretamente vecina
tras el otro lado de la pared)
que somos sólo peces de una noche profunda
navegando bajo la tierra removida de las fosas.
© José Pepe Cruz
TEXTE - FRANçais
Nous sommes les poissons des abysses qui n’ont pas évolué pour devenir phosphorescents
Cette nuit
n’est pas la nuit
où Vallejo
a découvert l’abandon de Dieu.
Elle n’est pas non plus la nuit
où, très jeune,
le même Dieu, ou peut-être un autre,
m’a brisé les jambes pour la première fois
en me précipitant depuis la falaise du monde.
Et pourtant,
quelque chose en elle parvient à pulvériser mes artères :
Le fantôme d’un phare en ruines qui appelle
au naufrage sous les draps bleus.
Sous les ombres de cette même lune neuve
qui cloue mes pieds au sol
un poète anonyme
sous le signe d’un drapeau
oublié dans les vieilles encyclopédies scolaires
écrit un prodigieux poème que je n’arriverai jamais à lire.
Sous ces mêmes ombres où mon sang vibre
un chat en flammes marche sur les toits du quartier
inondant la nuit de pupilles
– il enfle, enfle…-
et au fond des parkings, les chiens se déchaînent
au passage des fantômes qui cherchent ma porte.
Je sens
(la vérité m’a peut-être été murmurée
par une voix secrètement familière
venue de l’autre côté du mur)
que nous ne sommes que les poissons d’une nuit profonde
naviguant sous la terre arrachées aux fosses.